La peinture sur cube est l’aboutissement d’une réflexion sur le volume. Comment pouvais-je traduire mon travail coloré à l’huile ou aux pastels en traitant la sculpture ?
Il me fallait une forme simple s’effaçant devant la peinture et induisant la notion de masse colorée et non de sculpture peinte. J’optais pour le cube, forme simple, compacte, stable sur toutes ses faces, l’équilibre parfait.
La première étape était franchie, et répondait en tous points à mes attentes. Le cube trouve désormais sa place aux côtés des toiles et des pastels et ouvre une nouvelle porte en se projetant sur le papier dans un travail aux crayons de couleurs. Des passerelles se créent d’un support à l’autre et se justifient l’un l’autre.
En second lieu, le cube peint existant devait être montré. Il n’était pas question de l’abandonner sur une sellette ou le coin d’une table. Je voulais lui conférer une préciosité à l’instar de celle qui émane des pastels. Je partais en quête d’un support pour le magnifier, une fois n’est pas coutume. Je répugne en général aux éclairages trop présents sur une toile pour en accentuer un détail ou quelque effet dramatique. Mais le propos n’est pas là, retour à mes cubes. J’avais travaillé il y a quelques années sur des grandes ardoises peintes recto verso, le trouble s’installait entre surprise, mystère et frustration ; avec les six côtés d’un cube le jeu n’en est que plus savoureux. Je décidais de lui adjoindre une boîte à peine plus grande que le cube, capitonnée à l’intérieur et recouverte de feuilles d’or à l’extérieur. Ses fonctions sont multiples, la fois piédestal, cadre, ou écrin ne laissant plus visible aucune des faces sur les trois au mieux exposées aux regards. Il me fallait cette préciosité de l’or pour révéler plus encore la rudesse du cube de bois ou de béton d’origine. L’or perturbe, agace ou réjouit, détourne les yeux de la proposition initiale, la peinture, qu’il exalte pourtant. Sensible à la moindre variation de lumière, il se fait l’écho des couleurs, vibrant selon les heures aux modulations de l’éclairage. Les cubes trouvent alors sur la surface lisse et miroitante, une résonance tout en contrepoint et ornementation.
Ainsi au fil des jours, les cubes se retrouvent-ils dessus, dedans, à demi sortis ou à côté, jouent de l’éclat de l’or qui réchauffe une couleur, et se reflètent à leur tour sur les surfaces dorées. Il y a dans ce travail un rapport à l’histoire de l’art, l’envie de l’inscrire peut-être entre retable baroque et monochrome de Klein, le grand écart.
Puis, désireux d’exalter le contact, peinture dorure, et d’en multiplier les effets, j’inverse la proposition, désarticule la boîte gardée à demi béante. Dorée à l’intérieur, elle montre à l’extérieur la rudesse du matériau laissé brut que je souhaite en acier. L’idée de la boîte, écrin luxueux reste entière, sa lecture est intacte. Le cube repose sur une face, entouré de toute part de faces dorées qui font office de réflecteurs de couleurs et de lumière. La boîte éclatée apparaît comme un rempart protecteur autour de lui ne le rendant accessible que du regard. Tel en est-il ainsi du coquillage exhibant une perle, prêt à se refermer au moindre danger.
D’autres cubes sans boîte s’isolent en haut de poutres posées verticalement, deviennent les prolongements colorés de ces morceaux de bois brut où seul un liseré de dorure relie les deux éléments, vestige d’une boîte disparue.
Au travers de ces mises en situation, la peinture reste toujours le point de départ, ce qui donne à mes yeux une cohérence à l’ensemble des supports et des techniques que j’utilise. Il y a là encore le désir de parler de couleurs, de la regarder différemment, de faire ce va et vient du volume au frontal qui en toutes circonstances vibrent au gré des lumières et du temps.
Philippe Fontaine
2 février 2012
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